Verbalisons

Chaque famille possède son lot de souffrances et d’injustices : une perte, un accident, un attentat, un suicide, une maladie, une fausse-couche, j’en passe … Si certains en parlent, d’autres les transforment en secrets.

Il y a plusieurs décennies, se taire permettait par exemple de sauver la vie de familles pendant la guerre ou la réputation “d’enfants de la honte” (fruits d’un adultère ou d’un viol). Aujourd’hui, pour “aller bien” et probablement aussi pour tenter de les oublier, certains événements douloureux sont parfois tus et deviennent à leur tour des secrets familiaux.

Pourtant, le non-dit s’exprime inconsciemment par des changements de comportements, des lapsus, des attitudes étranges, des mimiques ou une voix qui change à la pensée du secret. Parfois il s’agit de réactions plus franches comme des pleurs ou de la colère sans motif apparent.C’est là tout le paradoxe. Le silence est gardé dans une bonne intention, mais il finit par être toxique.

La psychologue Marie Lani-Bayle explique qu’étymologiquement, le mot secret vient de “sécréter” : “c’est parce qu’il suinte, qu’il transpire, que le silence fait des vagues”. Selon la psychanalyste Françoise Dolto “on traumatise par le non-dit beaucoup plus que par le dit”.Si le jeune enfant peut se sentir “responsable” de la souffrance qu’il pressent chez son parent, l’ado peut imaginer que ses parents sont coupables d’actes terribles cachés et perdre toute confiance.

Ainsi en mettant des mots sur nos souffrances, on se libère d’un poids, et on libère nos proches des conséquences du
silence.Verbalisons pour dire ce qui fait mal ou ce qui dérange, avouons nos erreurs, nos émotions, déculpabilisions. Faisons-le pour nous affirmer. Affrontons nos peurs, ce qui pourrait nous faire honte, le jugement des autres, leur regard.

Verbalisons pour être dans le vrai ….pour être libre.

Laure